

Benchico Marseil
Né(e) le 15 août 1989 à Trois-Rivières Rencontré(e) le 11 octobre 2014 à Gourbeyre, Guadeloupe. Dans la catégorie : Portraits-
La première fois que j’ai vu jouer Benchico, c’était dans le cadre de mon travail, alors que je prenais pour le journal qui m’emploie les photos d’un match de Coupe entre deux équipes de première division guadeloupéenne, l’AOG et Saint-François, au hall Paul Chonchon de Pointe-à-Pitre. Ce qui m’avait surtout frappé, au-delà de ses qualités défensives et de son impact au rebond, c’était son enthousiasme sur le terrain. C’est souvent ce genre de joueurs qui me saute aux yeux en premier, et pas seulement parce que j'ai de grandes chances d'obtenir de bonnes photos. Leur façon de jouer me parle parce qu’elle me renvoie à la notion de plaisir, d’intensité, que de nombreux sportifs tentent d’atteindre sur un terrain.
-
J’ai revu Benchico jouer une semaine plus tard, en finale de Coupe, contre l’EDO, l’équipe qui gagne tout sur l'île depuis quelques saisons. Son énergie débordante et communicative a fini de me convaincre de réaliser son portrait. Et de le rencontrer sur le playground de ses débuts.
-
"C’est le terrain de Valkanaërs. Là où j’ai commencé", m'explique-t-il quelques jours plus tard, tandis que le soleil se couche sur les collines qui entourent Gourbeyre. "J’ai commencé ici avec des amis. Ils ne sont plus là, ils sont pratiquement tous en Métropole. À part Arendi, qui est toujours ici. C'est un chanteur, il fait du dancehall, du rap, du bouyon..."
-
« J’avais autour de 13 ans quand j’ai débuté le basket. Au début, c’était dur. Je ne connaissais pas les lignes du terrain, c’était marcher, reprise… Avant ça, je ne faisais pas de sport. Enfin, j’avais commencé le tennis. Mais au bout d'un an, j'ai arrêté. »
-
Aujourd'hui, Benchico mesure 1,99 m. "Avec les chaussures !", blague-t-il. "Mais je n’ai pas toujours été grand. J’ai grandi après avoir commencé à jouer. C'est là qu'à l'AOG, ils m’ont demandé de venir jouer avec eux. Mais aujourd'hui encore, je préfère le playground au championnat. Dès que la saison se termine, c’est mode playground. À Basse-Terre, sur le terrain Swé Basket Old School, ou à Saint-Claude. Avant, on allait souvent à Trois-Rivières. Sinon, c’était ici."
-
"Le basket représente beaucoup de choses dans ma vie. Il m’a permis de mûrir, d’avoir des contacts, d’avoir mon taf. Et J’aime l’environnement de ce sport. Après une semaine de boulot, le week-end, tu retrouves tes potes, on s’amuse ensemble." Sa mentalité, Benchico la résume ainsi : "Quand je rentre sur un terrain, il faut que je sois sur tous les rebonds pour mes amis. J'aime bien contrer, aussi. Et je rigole. Il faut se faire plaisir !"
-
Lorsque je lui demande quels joueurs l'ont inspiré, Benchico n'hésite pas très longtemps. "En NBA, Shaquille O’Neal, Dwight Howard, des joueurs de mon poste. Stoudemire, aussi, parce qu’il est très underground. Il aime les trucs And1. Sinon, en Guadeloupe, à mon poste, il y a Frantz Mazamba. Il jouait à l’AOG, il a joué en Nationale, aussi, en France. C’était comme un grand frère quand j’ai commencé. On a pratiquement le même jeu, mais il est largement plus costaud que moi. C’est un mec de Gourbeyre, aussi."
-
L'attachement de Benchico à sa ville est palpable. Et c'est réciproque. Ici, tout le monde le connaît, c'est un peu la mascotte. L'un de ses rêves : "gagner un titre seniors" avec ses potes de l'AOG, les Mike Brissac, Mickaël Voitus, Livio Alet (et Manu Augusta, le dernier arrivé). "J'ai déjà gagné trois titres en juniors avec le club. Avec les gars, ça fait longtemps qu’on joue ensemble. Même dans les tournois playground. C’est des amis. Nous sommes toujours soudés." Comme lui à sa ville. "Gourbeyre, c’est une ville assez tranquille, posée. Tout le monde connaît tout le monde. Il n’y a pas beaucoup d’actes de violence. Bon, après, le sport a baissé. Avant, ici, à cette heure, il y avait plein de jeunes. C’était rempli : basket, football… Mais ce playground a fait son temps, il est fermé aujourd'hui. Le maire a un projet de tout détruire, pour tout refaire..."
-
Avant de partir, je lui demande la signification de son prénom. "Ce sont mes parents qui l’ont choisi. Ils sont d’origine haïtienne. Quand j’ai demandé à ma mère, elle m’a dit que ça voulait dire "la gentillesse", "l'enfant sage". Il se retourne vers moi, et sourit : "Je suis un enfant sage, non ?"
-
Benchico est reparti comme il est venu. Sur le scooter de son petit frère Didier, dans la nuit de Gourbeyre. Tranquille. Comme sa ville.