

Élodie Roussas
Né(e) le 1er février 1991 aux Abymes, Guadeloupe Rencontré(e) le 27 janvier 2015 à Les Abymes, Guadeloupe. Dans la catégorie : Portraits-
Ce qui m’a tout de suite frappé chez Élodie, c’est son intensité en défense. La première fois que je l’ai vu jouer, c’était dans le cadre de mon travail, alors que je devais écrire un article sur un match de son équipe, la MJC des Abymes, opposée ce jour-là à un autre club de la 1re division guadeloupéenne, le Phœnix de Petit-Bourg.
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Ce samedi-là, la victoire était revenue aux Abymiennes, et Élodie y était pour beaucoup, elle qui avait eu à l’usure sa vis-à-vis, la scoreuse adverse Jennifer Estrella-Diaz.
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« Ça a toujours été comme ça, m’expliquera-t-elle quelques semaines plus tard, en terrasse d’une boulangerie des Abymes, sa ville. Pour moi, pour marquer, il faut défendre. Je suis quelqu’un qui aime les challenges. S’il y a une fille qui est forte en face, je veux défendre sur elle. Et essayer de lui prendre la balle. Même si je sais qu’elle est plus forte que moi, il faut que j’y arrive. J’aime aller au combat. Je préfère récupérer les ballons en défense, et distribuer des ballons en attaque pour mes copines. »
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« Défensivement, mon modèle, c’est Iverson. Je l’ai beaucoup regardé jouer quand j’étais jeune. Je trouve qu’il est toujours intelligent en défense. Ce n’est pas forcément quelqu’un qui va courir partout, mais en une fraction de seconde, il peut te prendre la balle. »
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Selon Élodie, son goût pour la défense constitue « un trait de caractère. J’ai toujours aimé ça, défendre. Exercer un pressing, monter sur la meneuse, l’emmerder quand elle remonte la balle. »
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« Je pense que le basket reflète ta personnalité. Je sais que sur un terrain, je ne lâcherai jamais rien. Même s’il reste une seconde, je vais me donner à fond. Dans la vie, je suis comme ça. Peu importe, je me battrai toujours. Tu tombes, mais il faut te relever. Grâce au basket, j’arrive parfois à me remettre en question. Avant, je me trouvais beaucoup trop nerveuse, impulsive. J’ai commencé à régler ces choses-là sur un terrain », confie Élodie, qui prépare actuellement un diplôme d’éducatrice sportive.
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Le déclic s’est produit lors de son cursus universitaire au College of Southern Idaho, à Twin Falls, ville située à 350 km (220 miles) au nord-ouest de Salt Lake City, la capitale de l’Utah. Ces quatre années constituent son plus beau souvenir basket. « Là-bas (aux États-Unis), j’ai remarqué que justement, je m’ouvrais beaucoup plus aux gens. Et que les gens s’ouvraient beaucoup plus à moi, également. Plein de gens jouent au basket, ce n’est pas qu’une question de technique. Il faut aussi l’avoir dans le sang. C’est un sport qu’on vit, ce n’est pas juste quelque chose que tu apprends. »
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Je demande à Élodie ce qui l’a le plus marqué lors de son aventure aux États-Unis. « C’est lors des Finals Championships. On était parti jouer contre la deuxième équipe de l’État, une autre équipe de l’Idaho. Pendant toute l’année, elles nous battaient, on les battait, elles nous battaient, etc… C’était un peu la guerre entre nous, on se charriait sur Twitter. Avant le match, franchement, j’avais super peur. Je paniquais parce que je sentais que pour les autres, c’était un gros enjeu. C’était comme si c’était des playoffs ici (en Guadeloupe), mais ça a l’air super « big ». T’as ta bague de championne à la fin ! On jouait chez elles, le match était génial. »
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« Mon plus beau souvenir, c’est en fin de match. Je devais défendre sur Georgia, l’une des meilleures joueuses de notre conférence. » Élodie agite les mains, comme si elle revivait ce moment. « Franchement, si on me demande aujourd’hui pourquoi j’ai fait ça, je ne sais même pas... Mais à un moment, elle arrive en face de moi, je claque des mains devant elle, et je dis « Come on, come on, show me what you got ! » »
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« Quand j’ai fait ça, elle a complètement perdu les pédales, en fait. Sur le coup, elle était un peu choquée, parce que je n’étais pas forcément réputée pour être l’une des joueuses avec, comme on dit là-bas, « too much confidence ». Moi, j’étais plus en retrait, je prenais mes shoots quand il fallait. J’étais la petite frenchy qui est là pour défendre, quoi ! J’ai réussi à la faire sortir de son match, et c’est là, peut-être, que je me suis rendu compte que j’avais franchi un nouveau palier en étant là-bas. J’ai vraiment senti que mon basket avait changé. »
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C’est tout naturellement que nous nous sommes retrouvés sur le playground des Abymes, non loin du gymnase où joue la MJCA. « Quand j’étais petite, je passais tout mon temps sur ce terrain », sourit Élodie, comme plongée dans ses souvenirs.
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« Je sortais du collège de Boisripeaux. En fait, j’aimais jouer avec des garçons, parce que quand j’étais petite, je trouvais que les filles, ça pleurait fout le temps ! C’était mon point de vue avant », rigole-t-elle.
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« Quand je jouais avec les garçons, ils ne faisaient pas de différence avec moi. Au contraire, ils me disaient « Tu viens ? Bah attends toi à te prendre des coups ! ». Qu’il soit midi, 17h, dès qu’il n’y avait pas entraînement, j’allais jouer avec eux sur le terrain. Après, quand j’arrivais avec les filles, je faisais la différence. Je pense que jouer avec les gars m’a aidé. C’est mon père qui m’a toujours entraînée à aller faire des « swé » avec eux. »
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C’est justement son père, Éric, ancien joueur, qui lui a mis un ballon dans les mains. « J’étais toute petite, j’avais 4-5 ans. Ma mère a joué au basket pendant 15 ans à la MJCA, mais elle s’occupait plutôt de tout ce qui était scolaire. Et mon père, du sport. Quand il entraînait les seniors filles du BMBC, j’avais mon ballon sur le côté du terrain, et j’essayais de faire comme elles. Même avant ça, j’allais avec mon père à des matches, quand il arbitrait. Vraiment, j’ai baigné dans le basket tout de suite. Je n’ai pas forcément vu le truc arriver. »
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« Ce qui me plaît le plus dans le basket, et surtout dans le basket féminin, c’est que je trouve qu’on est parfois plus physiques que les mecs, en fait. Ça joue beaucoup plus technique. C’est un sport physique, et c’est un sport où il faut être intelligent. Il ne faut pas forcément avoir que des muscles et des jambes. Il faut aussi réfléchir. C’est ce que j’aime, en fait. Et puis c’est un esprit d’équipe, c’est tout le monde en même temps. »
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Avant qu’on se quitte, je demande à Élodie si elle a une devise qui la guide, au quotidien. « Ma phrase, vraiment, c’est « life goes on ». Tout simplement pour me dire que, peu importe ce qu’il se passe, il faut se relever. La vie, elle continue. Il ne faut jamais s’arrêter. Pour moi, on est là pour un but, et voilà, il faut se battre ! »
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« Mon but ? C’est tout simplement de vivre tranquillement, de vivre de ma passion, de vivre avec les gens que j’aime autour de moi. J’ai envie de vivre chaque chose que je fais à fond. Et de me dire que ma vie, je l’ai kiffée jusqu’au bout. » Comme une interception qu’elle serait allée chercher avec détermination, avant de lancer une partenaire en contre-attaque.